Leila Mourad, un papillon au cinéma à la voix suave et gaie

Dr Nesrine Choucri Mardi 16 Février 2021-21:38:59 Chronique et Analyse
Leila Mourad
Leila Mourad

Tel un papillon, Leila Mourad demeure jeune et belle dans les esprits. Ces énormes robes aux couleurs claires lui donnent encore de nos jours l’image d’une princesse qui s’est évadée des contes des mille et une nuits. Sa beauté, sa douceur et ses chansons restent gravés à jamais dans les esprits des téléspectateurs égyptiens. Née le 17 février 1918, Mourad incarne le romantisme, la douceur et la docilité de tous ceux qui appartiennent au signe du Poissons.

Leila Mourad, de son vrai nom Liliane Zaki Mourad, a grandi au Caire. Son père, Zaki Mourad, était un musicien fort respecté. Ainsi, a-t-elle été éduquée dans une famille de bourgeois connue pour la passion de la musique. Au début de sa carrière, la jeune Leila interprète des chansons dans des cérémonies de mariage. Son frère, Mounir Mourad, devient plus tard aussi un célèbre acteur, chanteur et compositeur égyptien.

Leila fait sa première apparition à l’âge de 9 ans dans la salle de spectacle de la danseuse libanaise Badi’aa Masabni qui était la patronne de son père. Son premier film, elle le tourne à l’âge de 15 ans (la Victime). A l’origine, ce film devait être muet, mais, on y introduit la chanson de Mourad, « Le jour du départ ».

Elle a une vraie chance : en tant que chanteuse, elle a été formée par son père ainsi que par Daoud Hosni. La route royale du cinéma s’ouvre à Leila grâce au grand compositeur et chanteur Mohamed Abdel-Wahab. Ainsi, lui donne-t-il un rôle dans son film « Vive l’amour » en 1938. A partir de ce moment, le succès sera son allié : suite à ce film, Mourad tourne cinq films parmi les meilleurs avec le fameux réalisateur Togo Mezrahi.

Son succès atteint son paroxysme lorsqu’en 1945, elle tourne une série de films qui portent son nom : Leila fille des pauvres, puis Leila fille des riches, Leila fille de la campagne, etc… Cette série va commencer par « Leila, fille des pauvres » réalisé par le grand acteur Anwar Wagdy. En plus du succès foudroyant, Mourad a vécu une idylle avec Wagdy. Les deux se marient rapidement. Elle tourne sous l’égide de Wagdy une vingtaine de films : une star éblouit son public dans « Ghazal El-Banat » (Flirt de filles). A ses côtés, rayonnent également Naguib Al-Rihani et Youssef Wahbi. Des vedettes inoubliables !

Son mariage avec Anwar Wagdy ne tient pas longtemps. Elle se remariera après sa séparation. Mourad a décidé de se retirer rapidement du monde cinématographique. Au seuil de l’âge de quarante ans, elle s’éclipse et prend sa retraite. Aux yeux des spectateurs, elle est éternellement « le Cendrillon du cinéma égyptien » à son âge d’or. Une madone dont la voix rythmée fait encore rêver. Elle décède le 21 novembre 1955. Le Festival du film du Caire lui rend hommage en 1998. Au seuil de 37 ans et au sommet de sa gloire, Mourad se retire du cinéma égyptien et signe sa retraite. Elle commence sa carrière cinématographique avec « Vive l’amour » (Yahia Al-Hob » et la termine avec « L’amant inconnu » (Al-Habib Al-Maghoul). Un parcours qui a marqué à jamais le cinéma égyptien et arabe, mais aussi la chanson arabe. Leila Moura a chanté près de 1200 chansons et a travaillé avec les plus grands compositeurs arabes et égyptiens dont Mohamed Abdel-Wahab, Mohamed Fawzi, son frère Mounir Mourad, Ryad Al-Sonbati, Zakaria Ahmed, etc…

Mon cœur est mon guide (Qalbi Dalili) :

Réalisé par Anwar Wagdy et Hassan El-Seify, le film est dans les salles de cinéma le 6 octobre 1947. Il commence par des policiers qui guettent une criminelle. Leila, fille d’un pacha, arrive à la station de train. Par coïncidence, elle porte les mêmes habits et donne le même signe. Les policiers la suivent, puis l’arrêtent. Son père, un pacha, arrive au commissariat de police et explique la réalité aux policiers. Leila est alors libérée, mais le policier « Wahid » (Anwar Wagdy) la guette et la garde sous contrôle.

Lors d’un bal masqué, Leila est attirée par Wahid, elle croit qu’il l’aime. La police arrive ainsi qu’une bande de criminels. A la fin de la soirée, Leila est kidnappée par la bande de criminels et ils veulent la torturer croyant qu’elle connaît la place de la drogue. Wahid vient la délivrer.

Leila, fille des pauvres :

Il s’agit d’un film romantique musical produit en 1945. Kamal Sélim aurait dû réaliser ce film, malheureusement, il décède et Wagdy lui succède. Leila est une fille ordinaire, pas du tout riche. Elle habite le quartier populaire de Sayyeda Zeinab et rencontre une amie d’école, Samira, qui l’invite à une soirée. Leila cherche à s’excuser, mais son amie d’école insiste et la réconforte lui promettant de lui prêter une robe pour l’occasion. Leila accepte et décide de se rendre à la soirée. Le cousin de Samira, nommé Wahid, arrive et est épris de Leila. Samira cherche en vain à le séduire durant la soirée. Alors, elle décide de se venger des deux tourtereaux de l’amour.

Ainsi, a-t-elle présenté Leila à Wahid, comme étant la fille d’un pacha qui habite à Zamalek. Leila n’arrive pas à démentir cette fausse information et tombe dans le piège. A la fin de la soirée, Wahid (incarné par Anwar Wagdy) insiste à raccompagner Leila chez elle à Zamalek. Celle-ci n’a pas le courage de lui dire la vérité. Il la dépose devant la maison de Darwich Pacha et insiste à ne partir qu’après que la jeune femme soit rentrée chez elle. Leila doit pénétrer dans la maison par une fenêtre et se fait arrêter par le propriétaire. Ce dernier, en écoutant son histoire, éprouve de la compassion envers la jeune femme et la laisse partir.

Après une série d’aventures, et d’épreuves, Wahid découvre la vérité. Il apprend que le vrai père de Leila est Darwich Effendi et non Darwich Pacha. Wahid se rend chez Leila dans le quartier de Sayyeda Zeinab l’accusant d’escroquerie et de cupidité. Il la laisse effondrée et rentre chez lui pour annoncer à son père qu’il n’entend point épouser sa cousine Samira pour préserver la fortune de la famille.

Darwich Pacha qui sympathise dès le début avec Leila décide de lui léguer toute sa fortune pour convaincre Mokhttar Pacha d’accepter le mariage de son fils Wahid à Leila. Le jour du mariage, Samira annonce cette information au milieu de la cérémonie, causant l’effondrement de Leila et son départ. Finalement, Wahid, amoureux de la jeune femme, décide de la rejoindre dans son quartier populaire de Sayyeda Zeinab. Là-bas, la cérémonie de mariage se tient et l’amour triomphe.

Ce film constitue une étape importante dans la vie des deux acteurs Leila Mourad et Anwar Wagdy. Il a réalisé un succès foudroyant, en plus, c’était le début de leur union cinématographique et amoureuse. Car, Leila et Wagdy ont formé aussi bien des couples sur les écrans du cinéma qu’en vérité à partir de ce film.

Le film a connu l’étincelle de leur amour, et les scènes d’amour, de passion, de regard étaient d’une authenticité hors pair. D’ailleurs, même la cérémonie de mariage tournée dans le film était la vraie cérémonie de mariage de Wagdi et de Leila. Une idylle qui a contribué fortement au succès du film.

L’amant inconnu (Al-Habib Al-Maghoul) :

L’amant du cœur est diffusé dans les salles de cinéma le 23 mai 1955. Réalisé par Hassan Al-Seifi, le film est produit par Hussein Sédki et Leila Mourad. Il constitue la dernière apparition de Mourad sur les écrans avant de se retirer et partir très tôt à la retraite à un très jeune âge. Les spectateurs ne gardent d’elle que l’image d’une belle femme à la voix gaie et suave qui voltige sur les écrans avec charme.

Le film raconte l’histoire d’une jeune femme qui souffre d’une maladie cardiaque. Dr Hussein (incarné par Hussein Sédki) souhaite l’opérer pour la sauver, mais il l’aime aussi. La malade (Leila Mourad) pense qu’’il s’intéresse à elle, uniquement pour réaliser sa gloire en tant que cardiologue. A sa guérison, elle se montre froide avec lui, le jeune cardiologue pense qu’elle ne l’aime plus et qu’elle aime son ami.

Après des tensions, des larmes, et des aventures, Leila comprend que le cardiologue Hussein l’aime vraiment et qu’elle n’est pas juste une malade ordinaire qui lui permet de réaliser sa gloire. Au contraire, c’est son âme sœur. Leila le cherche et reconnaît son amour. Elle avoue la vérité, évoque ses craintes et l’amour triomphe comme d’habitude.

Leila Mourad et Hussein Sédki ont présenté plusieurs films ensemble. C’était un duo artistique très aimé tout comme son duo avec Anwar Wagdy. Sédki et Mourad ont pris très jeunes leur retraite laissant des noms inoubliables.

 

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